ÉGLISES « TORDUES »

Le mode de fondation produit des églises parfaitement rectilignes or, dans la réalité certaines églises ont des axes déformés ou tordus ? Comment l’expliquer ? Ce serait, dit-on une déformation volontaire rappelant la position du corps du Christ sur la croix ! 

Certaines églises présentent effectivement une torsion d’axe, soit brutale, soit progressive. À l’œil les déformations paraissent parfois importantes ce d’autant plus que l’édifice est grand (5 degrés à Quimper, de l’ordre de 1 à 2 degrés à Notre-Dame de Paris). En certaine petite église bourguignonne, la torsion atteint même 18 degrés ! Tout se passe comme si les bâtisseurs avaient été dans l’incapacité de respecter une ligne droite.
Bien des explications ont été avancées : déformation symbolique (le corps du Christ en croix en effet), adaptation à un terrain difficile ou existence de substructions antérieures entravant le chantier. Certains de ces explications sont peut-être valables, mais, dans la plupart des cas, le mode de fondation permet d’éclairer le sujet.

Oublions d’abord la représentation du corps du Christ sur la croix. Jusqu’au XIIe siècle, pour les Chrétiens, seule compte la Résurrection, la crucifixion est certes importante puisqu’elle constitue une étape nécessaire vers la Résurrection mais elle ne saurait être considérée comme le fait majeur et fondateur de la religion. Croix et crucifixion ne prendront de l’importance qu’au fil des siècles suivants. L’image du Crucifié est une “dévotion“ relativement tardive.

En fait, les désaxements ne s’observent que sur des édifices agrandis ou modifiés. Soit le chœur a été reconstruit sans que la nef ait été touchée, l’axe de l’église présente alors une cassure près de la croisée, soit l’église a entièrement été reprise suivant une disposition “tordue“.
Il suffit de revenir au principes du mode de fondation. L’agrandissement d’une église conduisait obligatoirement le Maître-architecte à modifier les Nombres symboliques (au moins la longueur L, Nombre de l’église). Un changement de proportion entre le Nombre du Poteau et celui du Double-carré s’accompagne inévitablement d’une rotation de l’axe. D’autre part, même en l’absence d’un changement de proportion entre Poteau et Double Carré, le glissement du calendrier julien suffisait à modifier la hauteur du soleil au jour de la fête du saint par rapport à ce qu’elle était à l’origine et donc influait sur la nouvelle orientation de l’axe !

La déformation de l’axe d’une église traduit vraisemblablement une correction architecturale destinée à conserver au sanctuaire agrandi sa signification symbolique.